Un jour au palais de Justice

Il y a des lieux ou il faut se rendre au moins une fois dans sa vie. Juste pour se faire sa propre idée d’un système ou d’un établissement. J’ai vécu ma première journée dans un palais de Justice

 

Entre l’ancien palais (poste de Bonanjo) et le nouveau (centre international de vaccination de Bonanjo), je penche immédiatement pour la nouveauté. Ma première impression n’est pas fameuse. Les bâtiments ont l’air délabré. Des herbes poussent ici et là dans le périmètre aménagé. A des kilomètres de l’image véhiculée par les séries télévisées. Ajouté au fait qu’il soit méconnu de plusieurs, je ne comprends vraiment pas pourquoi on l’appelle nouveau palais de justice. N’empêche. Un policier est placé à une entrée. D’autres à l’intérieur. A distance, sur les murs de la salle d’audience, je distingue des photos. De celles que l’on utilise pour les programmes funèbres. De près, c’est un greffier en chef, sourire aux lèvres, qui se présente à des élections internes. Un habitué m’indique « le » coin à regarder. Dans ce « coin », sur un babillard, plusieurs communiqués. Une alerte sur la corruption signée du Président du tribunal. Le renvoi d’une affaire. Et les rôles d’audience publique (liste des affaires de la journée). Elles sont soit en délibéré (pour un verdict), soit anciennes (elles ont fait l’objet d’un renvoi) ou nouvelles (tout le monde va les découvrir). Sans destination fixe, je prends la direction de la grande salle.

Un policier y est en faction. N’étant pas habituée des lieux, j’hésite. Il me cède le passage. J’entre. Face à moi se dresse une estrade. Un couloir est aménagé. Deux rangées avec des sièges d’église se côtoient. Je cherche une place assise. Le hasard me conduit aux côtés d’un titulaire d’une maîtrise en droit (je l’apprends plus tard). Grâce à lui, je ressors moins idiote du palais. L’assistance des deux rangées est constituée d’auditeurs libres.  Une affaire est jugée. C’est mon premier rôle de la journée.

Le prévenu, est à la barre des témoins. Il plaide non coupable pour une histoire de coup et blessures. Son avocat est assis à la gauche des auditeurs libres. C’est la place de tout avocat de la défense. La partie plaignante, ici représentée par le procureur de la république, est à droite. Entre la partie plaignante et la défense se trouvent deux boxes. Le box des accusés pour le prévenu et ses témoins. Celui de mon premier rôle a fini sa déposition et rentre occuper son siège. Le second box pour la victime et ses témoins. Le verdict est rendu (l’assistance a du mal à la saisir). Le prévenu du premier rôle de ma vie s’en va.

Au bas de l’estrade, un jeune homme, a peine plus âgé qu’un adolescent se lève et lit un autre rôle. C’est le greffier. Plusieurs chemises de couleur bleue sont empilées sur sa table. Il transmet la chemise à la dame installée sur l’estrade. Plus qu’une dame, c’est le juge d’instruction, également président du tribunal. Vêtue d’une toge et d’un rabat blanc (uniforme du magistrat), elle note les références du rôle dans un grand cahier.  Les concernés du rôle sont absents. Le procès est renvoyé. A ses côtés est assis un monsieur en costume noir. « C’est un stagiaire de l’Enam » me dit mon voisin. « Ils étaient 2. L’autre est sorti ». Il prend des notes. En prévision de ses futures fonctions.

Lors des procédures spéciales (procès épervier ou grande affaire publique), c’est un collège de juges qui se réunit. La procédure simple n’a besoin que d’un juge et d’un Procureur de la république, représentant l’état. Ledit procureur est toujours présent car toutes les affaires ou presque, (vol, meurtres, …) constituent une infraction à la loi. Un individu peut certes abandonner sa plainte contre X mais l’état poursuivra ce X car il s’est rendu coupable de crimes contre l’Etat.

Le collège d’avocats, en toge noir et rabat blanc, occupe les deux premiers bancs des deux rangées Dans l’attente de leurs rôles. Un individu peut être représenté par autant d’avocats qu’il le désire.

Je sors mon appareil photo. Il faut immortaliser l’instant. Mon voisin me demande aussitôt de le ranger. On pourrait me le confisquer. Le 4e rôle est annoncé. Une histoire de vente de maison. La défense n’a ni preuves ni témoins et demande un renvoi. L’avocat de la victime objecte. L’accord est trouvé : ce sera un renvoi ferme (qui entraine en délibéré pour un verdict).

Le prochain rôle est lu. Mon voisin m’informe alors que les rôles peuvent aller jusqu’à 22h, à défaut d’une suspension de séance par le président de tribunal. J’étais venue pour une affaire personnelle. Je sors donc de la grande salle et déambule dans les locaux. Au passage, je dénombre deux (02) salles d’audience. Il y en a plusieurs me dit-on.  

Au moment où je me dis je ferai le tour, je suis face à la porte du « juge d’instruction N°4 ». Elle s’ouvre, j’entre. L’accueil est courtois. Pas de doute, je suis à bon port. Faut toujours aller au-delà des apparences. Le tour, ce sera une prochaine fois. Lors de ma prochaine visite.

G Tjat



30/08/2012
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